En évitant les risques, protégez-vous réellement votre avenir financier ?

Auteur : Pascal Dion
Temps de lecture : 8 min

On croit souvent que ne pas bouger, c’est jouer la carte de la sécurité. Mais en matière de placements, l’immobilisme peut coûter bien plus cher que le risque lui-même. Et si, à force de vouloir protéger chaque dollar, on finissait par les voir s’évaporer lentement? 

 

Mais au fond, c’est quoi le risque?

Avant de parler de rendement, de placements ou de stratégies, il faut comprendre ce mot qu’on redoute souvent : le risque. 

En finance, le risque ne signifie pas forcément « tout perdre ». Il désigne plutôt l’incertitude : l’incertitude sur les rendements futurs, sur la valeur d’un actif, sur l’évolution des marchés. C’est la possibilité que les choses ne se passent pas comme prévu. 

Et ce risque a plusieurs visages. Il peut être de marché (les fluctuations des actions ou des taux d’intérêt), de crédit (le risque qu’un emprunteur ne rembourse pas), de liquidité (ne pas pouvoir vendre un actif rapidement), ou encore d’inflation (la perte de pouvoir d’achat dans le temps). 

Mais il y a aussi un autre type de risque, plus insidieux : le risque de ne pas atteindre ses objectifs. Celui-là ne fait pas la une des journaux, mais il peut avoir des conséquences bien plus graves à long terme. 

C’est pourquoi il est essentiel de connaître son propre profil de risque. Ce profil dépend de plusieurs facteurs : votre âge, vos objectifs, votre horizon de placement, mais aussi votre tolérance émotionnelle face aux pertes temporaires. Il n’y a pas de bon ou de mauvais profil, il y a simplement un profil qui vous ressemble. 

Et surtout, il faut se rappeler une règle d’or : plus le rendement potentiel est élevé, plus le risque l’est aussi. C’est un équilibre à trouver, pas une formule magique. Se méfier des promesses de rendements élevés sans risque, c’est déjà faire preuve de sagesse. 

 

La fausse promesse de la sécurité absolue

Un compte épargne qui ne bouge pas, un CPG qui garantit le capital, un compte chèque où l’argent dort paisiblement… Voilà ce que beaucoup considèrent comme des refuges sûrs. Mais cette tranquillité est souvent un mirage. 

Car pendant que votre argent « repose », le monde, lui, avance. Les prix montent, l’inflation grignote, et vos dollars perdent de leur pouvoir d’achat. Ce que vous pensiez protéger s’effrite en silence. 

Entre 2021 et 2024, les comptes épargne rapportaient entre 0,5 % et 2 %, alors que l’inflation variait entre 3 % et 6 % (Statistique Canada). Résultat : vous perdez de l’argent… sans même le voir. 

 

Se faire voler par l’inflation

Imaginez : vous placez 10 000 $ à 1 % pendant 10 ans. Vous obtenez 11 000 $. Pas mal ? Pas vraiment. 

Avec une inflation moyenne de 3 %, ce montant n’aura plus qu’un pouvoir d’achat équivalent à 8 200 $ d’aujourd’hui. Résultat : vous croyez avoir gagné 1000 $ alors que vous avez en réalité perdu près de 1 800 $ en valeur réelle.  

Et sur 20 ans ? Une inflation de 3 % réduit la valeur de votre argent de près de 45 %. C’est un effritement lent, invisible, mais implacable. 

 

Le vrai danger : rater ses objectifs de vie

Acheter une maison, financer les études des enfants, partir à la retraite sans stress… Ces projets exigent des rendements. Et les rendements exigent une certaine prise de risque. 

Prenons deux scénarios : 

  • À 2 % de rendement (comme dans un CPG, un compte d’épargne ou d’autres placements très sécuritaires), 300 $/mois pendant 30 ans vous donnent environ 141 000 $. 
  • À 6 % de rendement (comme avec une stratégie diversifiée incluant des actions, obligations et fonds équilibrés), 300 $/mois pendant 30 ans vous donnent environ 300 000 $. 

Même effort, 159 000 $ de différence. Ce n’est pas un détail, c’est un changement de vie. 

Selon une étude de BMO, les Canadiens estiment qu’il leur faudra 1,7 million de dollars pour prendre leur retraite confortablement. Pourtant, moins de la moitié (44 %) se sentent confiants d’y arriver. Quand on voit l’écart entre les objectifs et la réalité, on comprend rapidement que trop de prudence peut coûter très cher à long terme. 

 

Quand la peur vous fait perdre plus que les marchés 

En 2025, dans un contexte économique incertain, beaucoup d’investisseurs canadiens ont adopté une posture défensive : arrêt des cotisations, repli vers les CPG, retrait des marchés. Pourtant, ces décisions, bien qu’intuitives, sont souvent contre-productives. 

Suspendre ses cotisations ou fuir les marchés revient à freiner sa croissance financière et à renoncer aux avantages fiscaux. C’est comme refuser de monter dans le train… parce qu’il pourrait ralentir. 

 

Le temps : votre superpouvoir financier 

Ce que les marchés vous prennent parfois à court terme, ils vous le rendent et bien plus à long terme. Le S&P 500, par exemple, a généré un rendement moyen de 10 % par an depuis 1926. Même avec les crises de 2008 ou 2020, un portefeuille diversifié sur 15 à 20 ans a très peu de chances d’être perdant. 

Et grâce à la capitalisation, vos gains génèrent des gains, qui génèrent encore des gains. C’est l’effet boule de neige… mais version avalanche. 

 

Investir, ce n’est pas jouer au casino 

Prendre des risques ne veut pas dire tout miser sur la cryptomonnaie du moment ou suivre les conseils d’un influenceur TikTok. Il s’agit plutôt de choisir une stratégie de placement réfléchie et adaptée à votre situation : 

  • Diversification (actions, obligations, immobilier, etc.) 
  • Respect de votre tolérance au risque 
  • Alignement avec vos objectifs à court, moyen et long terme 

Et surtout, c’est gérer ses émotions. La peur est mauvaise conseillère. L’investissement systématique (ex. : cotisations mensuelles) permet de lisser les fluctuations et de profiter des baisses pour acheter à meilleur prix. C’est simple, mais redoutablement efficace. 

 

À trop vouloir éviter les pertes à court terme, on s’expose à des pertes bien plus grandes à long terme. 

L’inflation, les objectifs non atteints, le temps qui passe sans que l’argent travaille : voilà les vrais risques. 

Investir avec une stratégie claire et un niveau de risque adapté, c’est justement ce qui permet de réduire les incertitudes à long terme. 

Le vrai danger n’est pas la bourse. C’est de ne rien faire. 

Articles similaires

Le trading au sein d’une société de gestion : avantages, fonctionnement et limites

Le monde de l’investissement offre aujourd’hui une multitude de façons de faire fructifier son capital. Parmi celles-ci, le recours à une société de gestion, aussi appelée holding, gagne en popularité....

Les stratégies pour minimiser l’impôt sur les héritages

Vous allez hériter ou transmettre un héritage? Sachez que 45 % des successions posent problème en raison d’une planification insuffisante. Dans ma pratique, j’ai souvent constaté que le partage d’un...

Est-ce le temps d’acheter une maison?

Le marché immobilier suscite de nombreuses interrogations chez les acheteurs potentiels : est-ce le bon moment pour investir ou est-il préférable d’attendre ? Pour un premier achat, il est naturel...